Qualité de l'air dans le Métro Parisien - Part 1

September 22, 2018
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Hello !

Ceci est le début d’une série d’articles autour d’un sujet qui plus que jamais intéresse tout(e) citadin(e), celui de la qualité de l’air que nous respirons. Je vais plus particulièrement m’intéresser à l’air dans les transports parisiens. En effet, il est réputé assez pollué du fait de la circulation des rames & de la fréquentation.

Nous utiliserons des données publiques issues de capteurs de pollution du réseau SQUALES (Surveillance de la Qualité de l’Air de L’Environnement Souterrain). Elles sont disponibles en temps réel ici.

N’ayant pas trouvé d’analyse approfondie sur le sujet, j’ai décidé de me lancer dessus :)

Nous allons utiliser les données récoltées dans la station de métro/RER Auber (Opéra).

Cette première partie sera purement exploratoire, et permettra de visualiser les mesures en les confrontant aux valeurs limites permettant de protéger sa santé.

I. D’abord, les données

1. Import

Commençons par récupérer les données, à disposition sur le portail OpenData de la RATP (merci à eux !) Nous les transformons ensuite en une série chronologique multivariée. Cela veut dire que les données de capteurs sont représentées en fonction du temps, ce qui permet d’en suivre l’évolution.

Plus d’informations sur le site de l’organisme Airparif, un organisme français agréé par le ministère de l’Environnement pour la surveillance de la qualité de l’air en Île-de-France.

library(readr)
df <- read_delim("qualite-de-lair-mesuree-dans-la-station-auber.csv", 
     ";", escape_double = FALSE, col_types = cols(`DATE/HEURE` = col_character(), NO = col_integer()), trim_ws = TRUE) %>%
  as.data.frame()

2 Quels indicateurs de pollution ?

Nous avons donc les données suivantes :

  • DATE.HEURE : Ceci est … la date & l’heure de la mesure ! (#WOW) - Les relevés sont faits toutes les heures et s’étalent sur la période du 1er Janvier 2013 au 27 Juillet 2018

  • Paramètres climatiques :

    • TEMP : Température ambiante en °C
    • HUMI : Humidité relative en %
  • Qualité de l’air :

Paramètre Signification Impacts Seuil à ne pas dépasser en exposition prolongée/fréquente
NO Concentration moyenne en monoxyde d’azote en µg/m3 Pluies acides 40 µg/m3
NO2 Concentration moyenne en dioxyde d’azote en µg/m3 Pluies acides & inflammations pulmonaires 40 µg/m3
PM10 Concentration moyenne en PM10 en µg/m3 Maladies cardiovasculaires & respiratoires, cancers pulmonaires 40 µg/m3
PM2.5 Concentration moyenne en PM2,5 en µg/m3 Vecteurs de substances toxiques pouvant passer la barrière pulmonaire 25 µg/m3
CO2 Concentration moyenne en CO2 en ppm (partie par million) Marqueur de mauvais renouvellement de l’air 1000 ppm

PM vient de l’anglais “Particulate Matter” et désigne les matières solides en suspension dans l’air. C’est un mélange complexe de substances chimiques organiques et inorganiques, communément appelé “particules”. Elles sont classées selon leur taille en µm (1 micromètre = un millième de millimètre). Les particules les moins fines (+ de 10µm) sont retenues par le nez et la bouche. Les PM10 sont dites respirables et peuvent pénétrer dans les bronches. Les PM2.5 pénètrent plus profondément, jusqu’aux alvéoles pulmonaires.

Ces polluants sont principalement issus de l’activité humaine. Ils sont produits dans les souterrains ou à l’extérieur, à Paris-même ou transportés sur de longues distances.

Les principales causes de pollution de l’air sont :

  • Le trafic des rames : freinage, etc.
  • La fréquentation humaine
  • Le trafic routier
  • Le chauffage domestique et tertiaire
  • Les chantiers & travaux
  • L’industrie & l’agriculture

La notice explicative officielle des données est par ici

II. Exploration

Nous avons donc 47274 observations, dont voici un extrait :

DATE.HEURE NO NO2 PM10 PM2.5 CO2 TEMP HUMI
47269 2018-07-27 18:00:00 15 62 324 120 824 29.6 44.0
47270 2018-07-27 19:00:00 13 51 417 194 893 29.7 45.3
47271 2018-07-27 20:00:00 16 47 443 233 847 29.9 47.9
47272 2018-07-27 21:00:00 13 53 206 82 667 29.1 48.1
47273 2018-07-27 22:00:00 15 45 252 121 560 28.3 49.8
47274 2018-07-27 23:00:00 9 38 238 117 516 28.0 51.9
library(dygraphs)

Dans ce qui suit, quelques éléments vous permettent de mieux comprendre les données :

  • Sous chaque graphique, un curseur permet de zoomer sur une période en particulier
  • En bas à gauche de chaque graphique, un nombre vous permet de lisser les données, afin de mieux y voir. Plus le nombre entré sera grand, et plus le graphique sera lisible sur une période longue
  • Pour l’humidité et la température, une droite horizontale bleue représente la valeur médiane. Concernant les polluants, la valeur limite est représentée en rouge.

1. Monoxyde d’azote (NO)


44.9% des mesures sont au-dessus de la valeur limite.

Les mesures prises dans la station sont proches de celles relevées en extérieur, dans l’air parisien. Cette pollution n’est pas produite par la circulation des trains. En effet, les bouches d’aération des stations se trouvent souvent à proximité immédiate d’axes de circulation importants.

2. Dioxyde d’azote (NO2)


69.1% des mesures sont au-dessus de la valeur limite.

Même chose que précédemment, les pics coïncident avec les périodes de grand froid hivernal durant lesquelles beaucoup de chaudières thermiques tournent à pleine puissance.

3. PM10


85.3% des mesures sont au-dessus de la valeur limite.

Aïe, nous avons comme un sujet sur les particules en suspension.

Causées par l’activité ferroviaire (le freinage, principalement), elles sont significativement supérieures à ce qui s’observe en extérieur. Le passage des rames a de plus tendance à remettre en suspension les particules déposées. Les systèmes de ventilation opèrent ensuite un transfert de ces particules vers l’extérieur.

4. PM2.5


78.2% des mesures sont au-dessus de la valeur limite.

Même chose, les PM2.5 sont au-delà des limites la majorité du temps. Ceci est embêtant, dans le sens où ces particules très fines pénètrent le système respiratoire en profondeur.

5. Dioxyde de carbone CO2


0% des mesures sont au-dessus de la valeur limite.

Rien à signaler de ce côté !

6. Température


Allo ? Jean-Pierre Pernaut ?

7. Humidité

III. Corrélations

Même si cette approche est très discutable du point de vue méthode (Promis, on fera mieux dans la Partie II), regardons s’il existe des corrélations linéaires évidentes entre nos données :

corrplot::corrplot.mixed(cor(ts_all), upper = "ellipse")

Rien à signaler de ce côté, mis à part la corrélation entre PM10 et PM2.5 qui s’explique assez facilement. En effet, les PM10 (particules de taille < 10µm) englobent les PM2.5 d’une part, et les sources des deux sont identiques d’autre part. Le CO2 présente également un lien très léger avec les PM2.5 et 10, ce qui s’explique par le fait que ces trois polluants soient dus au trafic routier.

Packages utilisés :

  • Pré-processing des données :
    • lubridate : sans doute le meilleur package pour gérer des dates et des heures proprement. Supporte les fuseaux horaires et l’heure d’hiver. Membre de l’incontournable tidyverse.
    • dplyr : on ne le présente plus, indispensable pour préparer & manipuler les données
    • magrittr : permet de rajouter l’opérateur pipe (à prononcer avec l’accent anglais) à R et d’écrire x %>% f plutôt que f(x). L’essayer, c’est l’adopter quand on aime le code lisible !
  • Séries temporelles :
    • xts : apporte beaucoup de nouvelles fonctionnalités à la classe “time series” de R
    • imputeTS : utilisé pour imputer (remplir) les données manquantes. Par souci de neutralité et afin de ne pas créer de valeurs extrêmes, nous utilisons la médiane de la variable
  • DataViz :
    • dygraphs : graphiques interactifs adaptés aux données chronologiques

Conclusions

L’air dans les souterrains du métro est en effet pollué et cette pollution a des raisons qui parfois vont au-delà de l’enceinte du réseau :

  • Les oxydes d’azote (NO & NO2) proviennent de l’extérieur des stations et sont dus à l’activité dans la ville de Paris:

    • Circulation routière dense et en grande majorité fonctionnant d’essence & de gasoil, encore peu d’électrique et de vélos
    • Immobilier ancien, thermiquement peu isolé
    • Un parc d’équipements de chauffage ancien, peu efficient et pas toujours très propre
  • Les particules, en plus de celles provenant de l’extérieur, sont un véritable problème. Elles sont dues à l’abrasion des freins et des pneus. Le problème est que ces particules liées au freinage ne peuvent pas être éliminées à la source : c’est leur présence entre le disque et la plaquette qui assure le phénomène de friction et stoppe le véhicule. Cependant, une start-up Française, Tallano Technologie, propose une solution qui est un aspirateur à particules ultra miniaturisé et embarqué dans les systèmes de freinage.

  • Le CO2 est bien évacué, ce qui est le signe d’une bonne ventilation.

“Pour Airparif, “dans les enceintes du métro ou du RER, la qualité de l’air est mitigée. Certains polluants comme le dioxyde d’azote sont en plus faible quantité qu’à l’extérieur, ou quasiment absents comme l’ozone. D’autres comme les particules peuvent atteindre des niveaux beaucoup plus élevés dus à la circulation des rames et la fréquentation.” La RATP quant à elle est beaucoup plus mesurée. Pour elle, la qualité de l’air dans les espaces souterrains est globalement bonne. “Les résultats montrent un environnement chaud et sec, avec un bon renouvellement d’air des espaces (de 4 à 40 renouvellements d’air par heure)”, assure la compagnie dans un communiqué. “En ce qui concerne la pollution particulaire, due aux systèmes de freinage du matériel roulant, il s’agit d’un phénomène constaté dans tous les réseaux ferroviaires du monde, ajoute la RATP. S’il n’existe pour l’heure aucune norme en matière de particules dans les espaces souterrains, la RATP a engagé, dans une démarche volontariste, une série d’actions visant à réduire la présence des microparticules dans l’air.” Ainsi, l’entreprise est en train de généraliser, sur les nouveaux trains, le freinage électrique qui réduit les émissions de particules fines.”

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